Du 17/10 au 14/01
Meiji : Splendeurs du Japon impérial (1868-1912)
Musée Guimet, 6 place d’Iéna, 75116 Paris.
Ouvert tous les jours sauf le mardi, de 10h à 18h.
Billet combiné pour la collection permanente et l’exposition : 11,50€ / 8.5 €.
1868-1912 : un règne, celui de l’empereur Mutsuhito. Une ère, appelée Meiji, dont le nom signifie « gouvernement éclairé ». Quarante-quatre ans seulement, la moitié d’une vie, ont suffi au Japon pour se révolutionner : après deux siècles d’isolement hermétique de son territoire et de sa politique, le Japon s’ouvre à l’Occident. Il emprunte autant qu’il donne, sur le plan politique comme sur le plan culturel. Il crée son image à usage de l’étranger. Il doit se faire découvrir par le monde en même temps qu’il le découvre. Sans s’inventer de toute pièce, il se traduit dans la langue de l’Autre.
350 pièces réparties entre photographies, estampes, soies, émaux, sculptures, kimonos et paravents d’une valeurs inestimables. 350 pièces qui sont le squelette politique et le beau plumage culturel d’une époque à la fois capitale et méconnue de l’histoire nippone, l’ère Meiji.
L’ère Meiji, qui s’ouvre par un frais matin d’octobre de 1868, coïncide avec le règne de l’empereur Mutsuhito et indique la fin du confinement volontaire du Japon (le « sakoku »), son ouverture aux rapport politiques et commerciaux avec l’Occident. Quand il prête serment, Mutsuhito n’a que quinze ans, l’âge du sublime, du très haut et de la révolution.
L’empereur Mutsuhito, vêtu de l’uniforme militaire à l’occidentale
Le Japon comprend que les barrières ne marchent plus pour se protéger des menaces extérieures et que les portes ouvertes seront son meilleur bouclier. Il s’ouvre donc à l’Occident et fait en sorte que l’Occident lui prête ce qu’il a de bon à offrir : son savoir-faire industriel, ses structures politiques qui marquent la fin du shogunat et du système féodal, son système éducatif.
Le pont Tenjin à Osaka
Ce qu’il rend à l’Occident pour ne pas devoir se le voir imposer, c’est son image, voire son imaginaire. Après plus de deux cents ans d’isolement, le Japon crée l’imagerie du Japon et l’impose : les expositions internationales sont le prétexte idéal pour exposer le savoir-faire nippon, les émaux, les laques, la soie. Le Japon crée ses propres cartes postales qui feront rêver les Occidentaux : le mont Fuji enneigé, les glycines de Kameido Tenjin, les pivoines et la brume. L’Occident découvre la bravoure des coqs et la noblesse des oies, la consistance de la bruine et l’épaisseur du brouillard. La Japon a réussi à décoloniser son image et son savoir-faire en agissant plus vite que la pensée colonisatrice et en imposant ses références avant toute forme de caricature.
Boîte à décor de glycines, émaux cloisonnés et peints, argent, or Nagoya, Japon, vers 1905. Londres, collection Khalili © The Khalili Collections of Japanese Art
L’exposition s’articule en une dizaine de sections allant de la constitution du nouveau Japon réformé et la construction de sa propre mythologie (et ses résistances internes) en passant par les réformes religieuses souhaitées et réelles (la séparation forcée du shintoïsme et du bouddhisme), jusqu’aux déferlantes du japonisme qui ont inspirés et ne cessent d’inspirer les artistes et les artisans du monde entier. Meiji : Splendeurs du Japon impérial est à la fois une exposition d’art, d’histoire politique, d’anthropologie et, en quelque sorte et avec un peu d’audace, un précis de marketing de soi. Elle nous réapprend le sens des mots minutie, maestria et sublime.
(edg)